

Irak
Synthèse
principaux Indicateurs économiques
2020 | 2021 | 2022 (e) | 2023 (p) | |
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Croissance PIB (%) | -15,7 | 7,7 | 8,1 | 3,7 |
Inflation (moyenne annuelle, %) | 0,6 | 6,0 | 5,0 | 6,5 |
Solde public / PIB (%) | -12,8 | -0,8 | 11,0 | 9,0 |
Solde courant / PIB (%) | -10,8 | 7,8 | 16,0 | 13,0 |
Dette publique / PIB (%) | 84,2 | 59,1 | 36,5 | 35,0 |
(e) : Estimation (p) : Prévision
POINTS FORTS
- Réserves pétrolières très importantes (10% des réserves mondiales, quatrième plus grande réserve prouvée de pétrole brut dans le monde ; deuxième producteur de l’OPEP et quatrième producteur mondial)
- Faibles coûts d’extraction du pétrole
- Forte croissance de la population active
- Soutien financier international (FMI et prêts bilatéraux)
POINTS FAIBLES
- Économie peu diversifiée et fortement dépendante du secteur pétrolier
- Faible poids du secteur privé, hors hydrocarbures, dans le PIB
- Faible investissement public, la ressource étant centrée sur les salaires, les retraites, les subventions et les aides sociales
- Faiblesse et étroitesse du secteur bancaire
- Tensions fortes entre la majorité chiite au pouvoir et le reste de la population (sunnite, kurde…), manifestations fréquentes
- Tensions avec le Kurdistan autonome et important contributeur au secteur pétrolier
- Fortes inégalités, notamment entre ceux ayant accès aux ressources pétrolières et les autres
- Déficience des institutions, ainsi que des systèmes éducatif, sanitaire et de protection sociale
- Corruption, népotisme et patronage endémiques
Appréciation du risque
Une reprise tirée par l’activité pétrolière
Malgré un soutien (limité) de l’Etat, l’économie irakienne a été particulièrement affectée par la pandémie de COVID-19 et par la mise en pause de l’économie mondiale en 2020, en particulier du fait de sa très faible diversification et de sa dépendance à l’activité pétrolière (60% du PIB et 90% des recettes de l’Etat). En 2022, sa croissance augmentera, tirée par la reprise de l’économie mondiale, et par la demande associée pour les hydrocarbures. Entre janvier et septembre 2021, le prix du pétrole a augmenté de 54%, incitant le pays à augmenter sa production, grâce notamment au champ de Kirkouk. Néanmoins, cette expansion a été freinée par l’application, bien que partielle, des limitations contenues dans l’accord l’OPEP+, dont le quota pour l’Irak devrait augmenter en 2022, en plus des augmentations mensuelles de productions prévues pour tous. L’Irak bénéficiera fortement de cette hausse des prix et de la production, via ses recettes d’exportation. L’économie non pétrolière rebondira également, par ruissellement de la manne pétrolière.
Malgré une légère amélioration, la reprise de la consommation des ménages reste lente et fragile, conséquence durable de la dévaluation de 25% du dinar par la Banque Centrale d’Irak en 2020 (passant de 1 190 pour 1 dollar, à 1 450 dinars), conduisant, alors, à une baisse de pouvoir d’achat pour la population, en particulier des produits importés. Une telle dévaluation est néfaste pour la consommation intérieure d’une économie si dépendante aux importations et peu diversifiée. Ainsi, alors que 25% de la population vit sous le seuil de pauvreté, les prix des denrées alimentaires, de l’électricité (à la fourniture aléatoire) et de l’eau ont augmenté, nourrissant de fortes tensions inflationnistes.
L’investissement sera porté par des projets internationaux, comme l’illustre le contrat de 27 milliards de dollars signé par le groupe Total avec l’Irak, composé de 4 volets étalés sur 25 ans, portant sur l’exploitation pétrolière et gazière et sur la construction d’une centrale photovoltaïque. Il s’agit du plus gros investissement d’une société étrangère en Irak. L’investissement non-pétrolier et public restera à la traîne.
Déficit public modéré, mais excédent courant confortable
Le solde du compte courant irakien est principalement déterminé par les recettes pétrolières, qui ont largement augmenté en 2021, et resteront sur cette tendance en 2022. Les autres produits d’exportation irakiens (bijoux, précieux, aluminium, produits agricoles) profiteront également d’une forte demande et d’une hausse des prix. Ainsi, malgré la reprise des importations liée au rebond de la demande intérieure, les recettes pétrolières assureront à l’Irak un excédent courant important.
Le solde public, qui s’était considérablement creusé en 2020 à cause de la chute des recettes pétrolières et de l’augmentation des dépenses pour faire face à la pandémie, restera modérément déficitaire, malgré l’envolée des revenus liés aux hydrocarbures, l’essentiel des recettes publiques. En 2022, ces dernières ne devraient pas retrouver leur niveau d’avant crise. Le solde public restera déficitaire, en l’absence de réduction de la masse salariale publique et de réforme des retraites qui absorbent une large part de la ressource. Le financement du déficit s’effectue par ponction sur les réserves de change.
Enfin, la dette publique, dont la part dans le PIB avait bondi en 2020, du fait de la dévaluation du dinar irakien, de la hausse du déficit et de réduction du produit intérieur, reste relativement lourde. Sa part extérieure (48% du PIB en 2020) a augmenté et est une source de préoccupation. Sa soutenabilité et sa diminution dépendent de mesures structurelles, notamment concernant les salaires du secteur public.
Beaucoup d’incertitude après les récentes élections
La situation politique et sociale demeure instable, comme l’illustrent les nombreuses manifestations anti-gouvernementales (mouvement Tishreen) à travers le pays depuis 2019. Les protestataires manifestent contre le chômage, la corruption, la déliquescence des services publics, la violence entretenue par les milices armées, parfois en lien avec l’étranger (notamment, l’Iran), et réclament un changement de régime. Le Premier Ministre, Moustafa al-Kazimi, en place depuis avril 2020, avait alors été désigné pour organiser des élections législatives anticipées en octobre 2021, initialement prévues en 2022, afin de calmer la contestation. La veille de la tenue du scrutin, les mouvements protestataires ont appelé au boycott. Ainsi, seulement 34% des électeurs se sont rendus aux urnes. Le parti du leader chiite Moqtada al-Sadr (parti nationaliste) est devenu la première force au Parlement, avec 73 sièges sur les 329, devant les partis kurdes (58), le parti sunnite Taqqadum (43), l’alliance chiite State of Law de l’ancien premier ministre Al-Maliki (37), et une trentaine d’indépendants, parfois issus de la protestation. La coalition pro-irannienne, l’Alliance Fatah, qui était auparavant une des principales forces politiques au Parlement, a enregistré un net recul par rapport aux élections de 2018, recueillant seulement une vingtaine de sièges, contre 48 auparavant. Malgré les attentes élevées, l’espoir de réformes est faible pour 2022, si l’on considère la faible participation, les influences étrangères, l’absence de majorité solide liée à la fragmentation du parlement et la mainmise des partis traditionnels à assise régionale, religieuse ou ethnique et de leurs caciques, souvent assortis de milices armées.
Concernant la politique étrangère, alors que l’Irak s’efforçait de garder des relations équilibrées avec ses principaux alliés, les États-Unis et l’Arabie Saoudite d’une part, et l’Iran, d’autre part, la montée en puissance du parti de Sadr, anti-américain et anti-iranien au parlement, pourrait faire changer les choses.
Dernière mise à jour : Février 2022